300F Clément Serveau
« Cérès et Mercure »
Tout comme le 5000 F Flameng, le 300F Clément Serveau ou «Cérès et Mercure» est un billet emblématique et mystérieux. Souvent fleuron d’une collection, il reste mal connu, nous vous présentons ici un petit morceau de son histoire.
Tout débute en 1930 par une étude de Clément Serveau pour un projet de billet de 10 Francs, non adopté.
En 1938, une grave crise diplomatique éclate avec l’Allemagne, le risque d’une guerre provoque un afflux aux guichets, les coupures de 5000F dites de réserves, Flameng et Victoire type 1934 sont utilisées, la diminution importante des stocks de la Banque de France oblige le Conseil Général a réagir.
Devant cette situation exceptionnelle, le conseil Général ordonne la création du billet de 300F ainsi que celui du 3000F. Ces 2 valeurs sont choisies pour exprimer le caractère exceptionnel de la situation. L’urgence est telle que l’on ressort des cartons d’anciens projets dont celui du 10F Cérès et Mercure de Clément Serveau, il est choisi car il ne ressemble à aucun des billets utilisés et entre donc parfaitement dans les critères de la Banque de France : à situation exceptionnelle, billets exceptionnels, le 3000F sera vert et uniface et le 300F blanc et reprendra le projet de Serveau.
Les accords de Munich calmeront temporairement les relations entre la France et l’Allemagne. Toutefois, le 300F est tout de même créé le 6 Octobre 1938, imprimé chez Prieur et Dubois et mis aussitôt en réserve.
De même, le 3000F ne sera jamais fabriquée mais remplacé par une nouvelle version de 5000 F Victoire.
Compte tenu de la pénurie de papier, le 30 F est imprimé sur le reliquat de papier du 10 F Minerve type 1915. Le filigrane du 300 F est donc le même que celui de 10 F et représente Mercure de profil.
La seconde Guerre Mondiale s’annonçant, ces coupures furent évacuées et stockées vraisemblablement sur les succursales de Nancy, Epinal et Saint Dizier entre Septembre 1939 et Mai 1940.
Plusieurs documents de la Banque de France de 1944 et 1945 font état de prélèvements de l’armée allemande auprès des différentes succursales notamment en coupures de 300 F au titre d’acompte sur les « indemnités d’occupation », c’est René Favre Gilly qui autorisera les envois de fonds pour payer ces « indemnités ». Les Allemands s’apercevront que ce billet n’a pas de valeur légale à l’époque et ils abandonneront les coupures.
Au moment de la réforme monétaire, il sera finalement mis en circulation le 3 Juin 1945, pour l’échange de l’ensemble des billets français ayant une valeur supérieure à 50 francs.
Cependant il ne connu pas le succès escompté, ni auprès du public, ni auprès des employés de la Banque de France qui trouvaient la valeur faciale difficile à comptabiliser. Il fût étudié une surcharge de 500 F - le billet n’est connu qu’à 2 exemplaires - mais le projet ne fût finalement pas retenu malgré la pénurie de 500 F de type Bleu et Rose.
Le 300F sera progressivement retiré de la circulation (entre 1948 et 1950) et privé de cours légal le 1er Janvier 1963. Selon une estimation de la Banque de France, environ 146.000 billets n’auraient pas été remboursés à ses guichets, chiffre qui peut paraître important mais que nous devons pondérer car il ne tient pas compte de ceux détruits, brûlé, mutilés ou simplement jetés. Comparativement aux autres valeurs faciales, le billet de 300 F a même été présenté de manière importante au remboursement ce qui confirme son impopularité auprès des français, contrairement à notre vision actuelle de collectionneurs.
Les billets émis présentent trois dates d’émissions:
- 06-10-1938: impression des lettres A à M, 1 million de billets par lettre numéroté de 1 à 1.000.000.
- 24-11-1938: lettre W de remplacement 852.000 billets émis en remplacement de 852.000 billets fautés dont une partie (17.000) ont été détruits car n’ayant pas servi au remplacement de billets fautés
- 09-02-1939: impression des lettres N à Z comportant également 1 million de billets par alphabet.